1. Description, Origines et Contexte
- Identité : Julaybīb (جُلَيْبِيب) est un surnom qui signifie « petit Julayb » (dérivé de jalbaba : recouvrir).
Son vrai nom n’a pas été conservé par les sources, signe de son humilité sociale. - Apparence physique : Les textes le décrivent comme très petit, difforme, au visage peu gracieux, au point que certains enfants de Médine se moquaient de lui.
- Statut social : Il n’était affilié à aucun clan ni aucune tribu, une chose très grave dans la société arabe de l’époque où la tribu était la première protection sociale et juridique.
- Origines obscures : Sa lignée et ses parents étaient inconnus. Cela le plaçait parmi les individus les plus marginalisés. Il n’avait ni richesse, ni famille, ni beauté.
- Solitude : Julaybīb menait une vie de solitude et d’isolement à Médine. Il n’était invité nulle part et il avait même du mal à se joindre aux groupes.
Sources :
- Ibn Sa’d, Tabaqat al-Kubra (4/304)
- Ibn Hajar, Al-Isaba fi Tamyiz al-Sahaba (1/559)
- Al-Dhahabi, Siyar A‘lam al-Nubala (1/382)
2. Rencontre et Attention du Prophète ﷺ
Après l’hégire, le Prophète ﷺ remarque Julaybīb. Il le traite avec bienveillance et essaie de l’intégrer à la société musulmane. Le Prophète ﷺ enseignait à sa communauté à ne pas juger selon l’apparence ni l’origine sociale, mais selon la piété.
Le Prophète ﷺ allait parfois s’asseoir à côté de Julaybīb pour le rassurer, s’informer de son état et s’assurer que personne ne lui faisait de mal. Cet acte était en lui-même une forme de dignité donnée à Julaybīb.
3. L’Épisode du Mariage
Julaybīb, du fait de sa condition, pensait qu’aucune femme ne voudrait de lui. Mais le Prophète ﷺ voulut l’aider à se marier, et voici le célèbre épisode :
a. La proposition du Prophète ﷺ
Le Prophète ﷺ dit à Julaybīb : Ne veux-tu pas te marier, ô Julaybīb ? »
Julaybīb répondit, humblement, que personne n’accepterait de lui donner sa fille.
b. L’intervention du Prophète ﷺ
Le Prophète ﷺ alla voir une famille d’Ansar réputée pour leur piété et leur confiance en Allah. Il leur proposa de marier leur fille à Julaybīb.
La famille fut choquée : ils espéraient un prétendant de haut rang, et pensaient que Julaybīb n’était pas un choix « digne » de leur fille.
La mère était catégorique, mais la jeune fille entendit la conversation et déclara : « Acceptez ce que vous propose le Messager d’Allah ﷺ, car il ne propose que le bien. »
Elle préféra le choix du Prophète ﷺ à celui de ses propres parents et à ses désirs personnels.
Source principale :
- Sahih Muslim, hadith n° 2472 (traduction partielle)
- Al-Mustadrak d’al-Hakim (4/36-37), authentifié
4. Le Jihad et le Martyre de Julaybīb رضي الله عنه
Peu de temps après le mariage, Julaybīb participa à une expédition militaire (Ghazwa, certains savants penchent pour la bataille de Uhud, d’autres pour une autre bataille).
Après la bataille, le Prophète ﷺ demanda : « Cherchez-vous quelqu’un ? »
Les gens citèrent leurs morts. Le Prophète ﷺ insista :
« Mais moi, je cherche Julaybīb ! »
On le chercha et on le trouva, entouré de sept ennemis qu’il avait tués avant d’être lui-même frappé.
Le Prophète ﷺ s’agenouilla près de lui, dit : « Il a tué sept personnes, puis ils l’ont tué. Il est de moi et je suis de lui. »
Puis le Prophète ﷺ le porta de ses propres mains et l’enterra lui-même, honorant ainsi sa dépouille.
Sources :
- Sahih Muslim, hadith n° 2472
- Musnad Ahmad (4/446)
- Al-Albani, Silsilat as-Sahihah, n° 2215
5. L’après-Julaybīb
Selon certains récits, la femme de Julaybīb, restée veuve très peu de temps après le mariage, fut connue pour son ascèse, sa piété et sa bénédiction dans la vie : « On disait qu’il n’y avait pas de femme parmi les Ansar plus riche qu’elle, ni plus demandée en mariage. »
(rapporté par Ibn Sa’d et d’autres)
Sources détaillées
Le hadith principal (Sahih Muslim)
Texte arabe :
عن أبي برزة الأسلمي رضي الله عنه قال :
« كان النبي ﷺ في مغزى له، فأفاء الله عليه. فقال لأصحابه: هل تفقدون من أحد؟ قالوا: نعم فلانا وفلانا. قال: هل تفقدون من أحد؟ قالوا: نعم فلانا وفلانا. قال: هل تفقدون من أحد؟ قالوا: لا. قال: لكني أفقد جليبيباً. فاطلبوه في القتلى. فطلبوه فوجدوه إلى جنب سبعة قد قتلهم، ثم قتلوه. فقال النبي ﷺ: قتل سبعة ثم قتلوه، هذا مني وأنا منه، هذا مني وأنا منه. قال: فوضعه النبي ﷺ على ساعديه، ليس له سرير إلا ساعدا النبي ﷺ، حتى حفر له ووضعه في قبره. قال ثابت: فما كان في الأنصار أيم أنفق منها. »
— [صحيح مسلم، كتاب الفضائل، حديث رقم 2472
Le hadith du mariage (Al-Mustadrak et autres)
عن أبي برزة قال :
جاء جليبيب إلى النبي ﷺ فقال: يا رسول الله زوجني. فقال: من نجد لك؟ ثم أتاه مرة أخرى، فقال له: زوجني. فقال: من نجد لك؟ ثم أتاه الثالثة، فقال: زوجني. فقال النبي ﷺ لرجل من الأنصار: زوجني ابنتك. فقال: نعم يا رسول الله، كرامة لرسول الله ﷺ ونعم عين. فقال: إني لا أريدها لنفسي. قال: فلمن يا رسول الله؟ قال: لجليبيب.
قال: يا رسول الله، حتى أستأمر أمها. فأتى أمها، فقال: إن رسول الله ﷺ يخطب ابنتك. قالت: نعم، ونعمين. قال: إنه لا يريدها لنفسه. قالت: فلمن؟ قال: يريدها لجليبيب. قالت: لا لعمر الله، لا أزوج جليبيباً، قد منعناها فلانا وفلانا. فبلغ النبي ﷺ قولها.
فقال: أنظري، لا تردين أمر رسول الله ﷺ. قالت: قد قبلت ما قال رسول الله ﷺ. فزوجها جليبيباً.
— [المستدرك على الصحيحين للحاكم 4/36-37]
(حسن إسناده الذهبي، وصححه الألباني في « سلسلة الأحاديث الصحيحة » 4/112)
Dans le Musnad Ahmad
عن أبي برزة، قال:
فَقَدَ رَسُولُ اللَّهِ ﷺ جُلَيبيبا، فَقَالَ: « مَنْ يَفْقِدُهُ؟ » قَالُوا: نَحْنُ نَفْقِدُ فُلَانا، وَنَفْقِدُ فُلَانا. قَالَ: « وَلَكِنْ أَفْقِدُ جُلَيبيبا. »
فَطَلَبُوهُ فَوَجَدُوهُ قَتِيلًا، قَتَلَ سَبْعَةً ثُمَّ قُتِلَ. فَقَالَ رَسُولُ اللَّهِ ﷺ: « قَتَلَ سَبْعَةً ثُمَّ قُتِلَ، هَذَا مِنِّي وَأَنَا مِنْهُ. » فَوَضَعَهُ عَلَى سَاعِدَيْهِ، حَتَّى دَفَنَهُ.
— [مسند أحمد 4/446، رقم الحديث 19700، إسناده صحيح]
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